Dave White : Retour sur des portraits animaliers poignants et intemporels

En regardant I See Your Soul de Dave White, il est difficile de se concentrer sur autre chose que les yeux du gorille qui regarde à travers le papier, fixés sur quelque chose dans le lointain. Cette œuvre fait partie d'une nouvelle série de portraits d'animaux au fusain, aux techniques mixtes et à l'huile, intitulée Devotion. 

Si vous parvenez à rompre le contact visuel, vous remarquerez à quel point l'image devient chaotique au fur et à mesure qu'elle s'éloigne de ces yeux, cédant presque la place à une abstraction complète sur ses bords. Lorsque je m'entretiens avec l'artiste, je comprends rapidement qu'il ne s'agit pas d'une erreur. Il dit : « quand vous avez ce petit moment de connexion avec un animal, il devient intemporel. » Pour moi, le dessin lui-même semble intemporel d'une certaine manière.

La pratique de White existe en dehors de la dynamique et de la dialectique qui imprègnent une grande partie de l'art d'aujourd'hui. Je n'affirmerai pas que l'art contemporain est né – ni même ce qui le définit exactement – mais je pense que l'on peut dire sans risque de se tromper que, depuis une centaine d'années, le sujet d'une grande partie de l'art est devenu plus complexe. 

Dans leur travail, les artistes s'engagent dans des débats sur ce qu'est l'art ou sur ce qu'il devrait être. Ils commentent la fonction de l'art et la manière dont sa forme devrait – ou ne devrait pas – suivre cette fonction. Ces conversations sont devenues le véritable sujet d'une grande partie de l'art contemporain, transformant ce que le spectateur voit dans l'image elle-même en une sorte d'accessoire représentant une déclaration ou une question dans le cadre du débat. En regardant le travail de White, le sujet ne semble pas être une doublure ou un outil rhétorique. Il semble plus sincère.

Cela ne veut pas dire que le travail est particulièrement simple ; comme il le dit lui-même, « ce ne sont pas de jolies peintures d'animaux et elles ne l'ont jamais été ». White a toujours été un amoureux des animaux, mais il veut atteindre quelque chose de plus insaisissable que de simplement montrer au spectateur à quel point ses sujets sont impressionnants. Il veut recréer ces exemples intemporels de connexion entre l'homme et l'animal. "Mon travail consiste à faire de mon mieux pour capturer ces moments". 

Dans cette quête, il emprunte aux boîtes à outils des mouvements artistiques de l'histoire. Dans la série Devotion, on retrouve les coups de pinceau et les éclaboussures de l'expressionnisme abstrait, le réalisme minutieux de l'art académique et bien d'autres choses entre les deux. 

Au cours de notre conversation, l'artiste parle dans le même souffle de la discipline requise pour peindre de manière réaliste (la peinture à l'huile, me dit-il, est une "maîtresse cruelle, cruelle") et de la nécessité de pousser plus loin et de dépasser les exigences du réalisme pour capturer un sujet avec le type d'intimité psychologique qui est le sien.

Il compare sa pratique à celle d'un artiste martial ou d'un musicien dans la mesure où, aujourd'hui encore, il l'aborde avec une ouverture à l'apprentissage et au développement... C'est peut-être ce qui lui permet de reprendre des motifs stylistiques et techniques issus de différents mouvements et périodes de l'histoire de l'art, faisant continuellement progresser sa pratique au lieu de se laisser définir par une catégorie particulière... Comme il le dit lui-même : « la dernière chose que je voudrais devenir serait une parodie de moi-même ». 

En fin de compte, c'est ce qui distingue White : en s'engageant à capturer fidèlement son sujet, en reportant les questions et les revendications sur l'art qui préoccupent tant d'autres, il se permet de se développer constamment en tant qu'artiste. Il me dit : « J'essaie simplement de faire de belles choses, et je vois la beauté dans tout. »