Depuis toujours, je navigue dans les sphères artistiques. Écoles préparatoires puis études au California College for Arts and Craft à San Francisco au début des années 1990.
À l’époque, je me vouais à la photographie puis j’ai rapidement découvert la céramique qui m’a complètement absorbé (et je n’ai jamais cessé). Seulement à l'époque, mes parents avaient posé leur veto. J'ai donc démarré des études en design industriel. J’ai effectué tout le cursus en m'intéressant systématiquement à la matière : bijouterie, menuiserie, fonderie et sculpture sur acier.
Nous y voilà, une classe, un professeur artiste sculpteur et une matière nouvelle totalement compatible avec mon état d’esprit ! Cela a été un choc dont, 30 ans plus tard, je ne suis toujours pas remis.
La matière, le matériau sont restés et j’en ai exploré tous les recoins, du moins autant que possible. Ma formation en design m’a apporté une méthodologie pour mes projets, au début plus orientés vers le mobilier et le luminaire. La sculpture n’est arrivée que plus tard, au cours des années 2000.
Vous définissez-vous comme designer métal ou comme artiste ?
Je n’aime pas trop les cases, même si en France, on s’y réfère beaucoup. Je continue de cultiver ma diversité en naviguant de la sculpture aux objets du quotidien, car la matière me le permet. En effet, l’acier à cela de versatile qu’il s’applique à beaucoup de domaines.
La sculpture requiert-elle plus de lâcher-prise que de contrôle ?
L’approche du matériau présuppose du contrôle et de l’attention puisque l’utilisation des machines est constante. Mais avec l’expérience, le lâcher-prise s’opère et il est plus facile de se mettre en phase en étant en prise directe avec la matière.
Dans quel lieu et quelle ambiance créez-vous ?
Le lieu de la création, c’est l’atelier, et l’atelier, c’est l’écorce de l’artiste, et celui-ci se trouve au centre. Les ambiances sont variées, mais toujours en musique, en l’accordant à la réalisation du moment. Ce n’est pas la même chose quand je forge et quand je patine.
Quelles sont les étapes de création d’une sculpture ? Quel rapport entretenez-vous avec le corps de la femme ?
Mon travail d’empreintes est réalisé avec des personnes du quotidien. C’est d’abord une rencontre puis une mise à nu. Il y a ensuite la performance du moulage, car c’est une épreuve difficile tant pour le modèle que pour l’artiste et il est primordial qu’elle se passe bien parce que sinon la sculpture s’en ressent.
C’est une rencontre avec des femmes qui n’en finit pas. L’étude du corps des femmes pourrait se résumer à la richesse de leurs courbes, ce qui pour un sculpteur est extrêmement intéressant, mais ce n’est pas assez. Il y a aussi naturellement la quête du désir.
Ensuite, c'est une autre histoire, car elle se passe dans l’atelier, dans le monde de l’acier, du bazar des machines, des chutes dans des caisses, beaucoup de petits morceaux d’acier partout.
"Le lieu de la création, c’est l’atelier, et l’atelier, c’est l’écorce de l’artiste et celui-ci se trouve au centre."
Qu’est-ce que le savoir-faire pour vous ?
Le savoir-faire c’est la somme des expériences en lien avec la matière telle qu’elle soit.
De quelle sculpture êtes-vous le plus fier ?
Je n’ai pas de fierté particulière avec mes sculptures. J’aime beaucoup les dernières généralement. En ce moment, je suis dans les bronzes alors celles-ci, je dirais.
Si vous deviez partager un moment avec un artiste de référence, lequel serait-il ?
Brancusi et personne d'autre. Pour l’humanité de la personne. Pour la qualité de son travail. Pour son rapport à l’atelier, la lumière et l’emplacement quasi religieux des formes les unes avec les autres.