La naissance d’une passion
Tout commence alors qu’Alain Pontecorvo n’a que trois ans. Dans un petit restaurant italien avec ses parents, il finit par s’impatienter et trouve un curieux intérêt au menu en papier disposé devant lui. Le dos y est vierge, et, épris d’envie de dessiner, il réclame un stylo à son père. Son premier dessin est une voiture. Le rendu est si réaliste que tous les clients accourent près des Pontecorvo pour admirer le dessin d’un enfant qui, à partir de ce jour, n’a plus jamais arrêté.
Pendant quelques années, Alain Pontecorvo étudie aux Arts Décoratifs de Paris. Une époque riche et productive avant qu’il ne soit appelé pour effectuer son service militaire. En pleine guerre d’Algérie à Oran, il parvient à s’entourer de militaires sympathiques qui le rattachent à un bureau-dessin. Il peut alors aisément gribouiller et faire ce qu’il aime le plus : dessiner.
Au retour du service militaire, il arpente l’école Estienne et assiste aux cours du soir dont il ressort Major de promotion. Une année durant laquelle il se perfectionne dans un domaine qu’il affectionne particulièrement : la typographie.
La carrière d’Alain Pontecorvo converge alors vers la publicité qu’il côtoiera pendant près de quinze ans. Il débute comme jeune directeur artistique chez HAVAS avant de collaborer avec une dizaine d’autres agences. La principale reste encore Roux-Séguéla, agence pour laquelle il a travaillé une grande partie de sa carrière de publicitaire.
« La pub m’a beaucoup appris au niveau de l’art graphique, de la mise en page, des formes dans l’espace. J’ai créé un caractère typographique d’ailleurs, le Pontecorvo ».
La rencontre avec Jacques Séguéla opère un tournant dans sa vie, tant professionnelle que personnelle. Et pour cause, il côtoie de nombreuses personnes influentes et de belles personnalités de la scène artistique.
Voilà donc une période follement riche où ses quinzaines d’heures passées par jour sur les tournages des films publicitaires le détournent progressivement de la peinture et du dessin. Sans pour autant abandonner complètement, Alain Pontecorvo finit par ressentir le besoin de renouer avec ses premières amours.
Le style Pontecorvo
Là où il se balade, Alain Pontecorvo embarque avec lui un petit appareil photo et un carnet de croquis. Une façon de pouvoir immortaliser n’importe quel moment et de pouvoir assouvir ce besoin irrépressible de créer.
"Mon objectif c’est de peindre ce que personne ne voit. On a des merveilles devant nous. Un coin de rue avec des voitures, personne ne regarde ça. Pourtant si on s’y arrête, il y a toute l’histoire du monde."
Ses natures mortes, ses portraits, ses paysages urbains, ses intérieurs : autant de sujets récurrents mais explorés de mille et une façons. L’œil ubiquitaire d’Alain Pontecorvo nous incite à focaliser notre attention sur des éléments a priori triviaux mais qui génèrent l’intérêt si on prend le temps de s’y attarder.
Un nuage qui passe, des gens dans la rue, des voitures en file indienne ou dans une rue étroite, des arbres sensibles aux changements saisonniers et surtout, la lumière. Le travail sur l’ombre et la lumière est précis, maîtrisé. Le clair-obscur retenu sur un quai de métro, par exemple, démontre toute la technicité du peintre.
"Je m’arrête et je prends une photo avant que ça ne disparaisse. Après je transforme, je recompose. C’est une image qui, dans ma tête, est restée dix secondes. Si je ne l’avais pas captée pendant ce laps de temps, c’était fini."
Son travail passe aussi par des portraits, souvent le fruit de commandes, et sa méthode est simple : chercher la dominante d’attitude chez son sujet et l’exploiter. L’idée n’est donc pas d’immortaliser quelqu’un de face comme un portrait plus classique mais de lui donner du relief, de faire ressortir sa personnalité. La tête relevée vers le haut, les jambes croisées, le regard rieur…
De belles rencontres et une reconnaissance à l’international
Marlène Jobert, Catherine Deneuve, Gainsbourg, autant de personnalités qu’Alain Pontecorvo a eu l’occasion de rencontrer au cours de sa carrière de publicitaire. C’est même au détour d’un dîner chez son ami Jacques Séguéla que Catherine Deneuve lui demande s’il peut réaliser l’affiche du film Hôtel des Amériques (André Téchiné, 1981) dont elle est l’actrice principale avec Patrick Dewaere.
Professeur d’arts graphiques et d’art plastique pendant plusieurs années à l’atelier de la Passerelle, le peintre enseignait à ses élèves comment observer la nature, en retirer le meilleur. Comment cultiver sa propre différence en prenant aussi connaissance des œuvres des grands Maîtres de la peinture et de la sculpture. Lui-même a toujours été très passionné par Velasquez, Rembrandt, Schiele, et aussi sensibilisé par Manet, Klimt et Lucian Freud.
"Il y a énormément d’artistes qui cherchent à être modernes, originaux. Ce n’est pas nécessaire de se dire ‘il faut absolument que je trouve quelque chose qui fera la différence’. Pour moi, le plus important est de travailler énormément, ne pas se mentir.
Les œuvres d’Alain Pontecorvo ont vu du pays ! À ce jour, le peintre possède encore pas moins de 600 carnets de croquis. Exposé à la Galerie de l’Europe à Paris depuis des années, ses travaux ont également été présentés au Musée de l’Imprimerie de Lyon, au Musée Olivier Brice à Montpellier.
En 2008, il a même eu l’opportunité d’exposer au National Art Club de New York. Des collections publiques et des privées aussi : en Allemagne, Arabie Saoudite, Grande-Bretagne, Hong Kong, Pays-Bas, et dans bien des villes aux États-Unis.